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Les photographies interactives sont des tableaux qui ne sont pas seulement sensibles à la lumière, mais qui sont également sensibles aux regards qui y sont portés.

En caressant la surface du tableau, le contenu de celui-ci évolue, se dissout, ou réagit d'une autre manière en réponse à l'attention porté par l'observateur. Landscopes est une série d'œuvres qui explorent les paysages naturels et habités. Chaque tableau expérimente des techniques et des typologies au sein des formes multiples d'expression offertes par la photographie interactive.

LANDSCOPES
Voici venir le soleil
(Here comes the Sun)

Ayguesvives, Canal du Midi

URBIdextre

Granada, Albaicin

La ville
qui ne dort jamais

Benidorm, Costa Blanca

Tolosa

Toulouse, Place de la Daurade

Convoitise

Jérusalem, Vieille Ville

Dieu merci
c'est vendredi

Jérusalem, Mur des Lamentations

Passagers

Jérusalem, ligne de bus Egged 4

Eau Hivernale

Port de Lers, Ariège

Non Lieu

Petah Tiqva, échangeur Yarqon

Au-delà du fleuve
et sous les arbres

Paris, Pont de Bir-Hakeim

Le pointeur

Petra Olympou, Macédonie (Grèce)

Ce travail est né de la rencontre entre la photographie traditionnelle, sa métamorphose numérique, et les opportunités algorithmiques offertes par l'ordinateur pour traiter des images dynamiquement suivant les agissements du spect'acteur. Les permutations programmatiques, en recombinant les images sans fin, ajoutent une nouvelle dimension de sens et de poésie, transcendant celle apportée par les photographies individuelles seules.

Antécédants

La photographie numérique s’affirme de plus en plus face à l’argentique. Un choix pléthorique d'appareils d'excellente qualité s'offre au photographe. Les réticences initiales des professionnels face au numérique se font de plus en plus rares. Dans bien des cas, l'écart de qualité des appareils haut de gamme est devenu imperceptible à l'égard des clichés argentiques. Même si le film photographique garde le timbre, le grain, et tant d'autres qualités de l'analogique, bon nombre d'artistes ont adopté le numérique afin de pouvoir exploiter ses propriétés propres.

Chaque nouvelle génération d'appareils se distingue par son compte megapixellaire, sorte d'argument de vente ultime. Certains appareils professionnels approchent la finesse du film. On peut imprimer des tirages de plus en plus grands... et l'arrivé d'imprimantes de plus en plus perfectionnées va rendre la chambre noire obsolète - avec un certain regret, pour les amoureux de la pénombre jaunâtre de la chambre noire, guettant l'appartion soudaine de l'image au fond de son bain de développement.

Dans une époque construite sur la vitesse, l'attente intrinsèque du processus chimique, le tâtonnement, le rebut du papier, sonne une époque révolue. Personnellement, en nostalgique de la chambre noire, la chose qui me manque le moins est la lutte constante pour enlever chaque dernière particule de poussière des négatifs. (Les dubitatifs du numérique remarqueront que le problème de poussière s'est reporté sur les appareils reflex, où chaque changement d'objectif porte le risque bien réel du dépot de poussière sur le capteur CCD, imprimant leur trace identique sur chaque image prise...)

In fine, en numérique, le processus entier de fabrication, de la prise de vue jusqu'à l'impression, étant "tout informatique", le photographe gagne en contrôle, en autonomie et en facilité dans son travail.

Les artistes ont très vite compris que si la photographie numérique est utilisée simplement comme une technologie alternative, limitée à la réplication de ce qui était fait auparavant en argentique, ils rateront tout un monde de possibilités créatives, conceptuelles et intellectuelles. Le transfert de la chambre noire sur ordinateur ouvre la porte à des techniques de traitement d'image inédites offertes par PhotoShop et autres logiciels semblables.

Ce qu'on faisait avant avec difficulté, en papillonant les mains frénétiquement entre agrandisseur et papier via l'intervention sur la lumière même - chaque erreur signifiant une feuille gaspillée - se fait avec une facilité déconcertante. Les erreurs, aujourd'hui, se paient en "contrôle-Z". On frémit en pensant aux exploits que Photoshop aurait permit aux génies de la manipulation photographique du KGB... d'ailleurs, leur successeurs, de l'ouest en est, ne s'en privent pas !

Nonobstant, l'objectif final est une image photographique individuelle, à imprimer ou à projeter. L'affichage sur ordinateur invite à d'autres aventures...

Concepts

La véritable révolution de l'ordinateur se trouve dans sa capacité à fournir un moteur novateur d'affichage. L'appareil constitue un tableau-automate capable de métamorphoser l'image affichée en temps réel, ouvrant la voie au développement de narrations inédites.

Le programme informatique, en tant de langage encodant un script, permet de doter l'image de l'aptitude à engager son propre discours dynamique. La poésie du tableau, qui s'exprime via la mise en œuvre d'une relation interactive avec le spectateur, ouvre des horizons nouveaux en termes de regard. Au lieu d’épier l'instant saisi "par-dessus l’épaule" du photographe, l’ordinateur permet au spectateur une intervention active, immersive, au sein même de l’image…

La photographie interactive met en question le statut du tableau lui-même. Depuis que les humains sont devenus des créatures créatives, culturelles, nous avons décoré les murs qui nous entourent. C'était vrai à Lascaux, et dans la Chapelle Sixtine. Aujourd'hui tout le monde, ou presque, pose des images sur ses murs. Le tableau interactif conteste la nature inerte de l'image traditionnelle, peinture ou photographie. Il va aussi au-delà du film, qui est linéaire, avec ses images enchainées en ordre séquentiel. Le tableau interactif, lui, permet au spectateur d'engager un dialogue interactif avec l'œuvre, qui dépasse la critique passive ou l'interprétation. Par là, il signifie un changement fondamental de la relation avec le sens traditionel de la représentaion picturale.

La photographie interactive permet au spectateur de "fouiller" aléatoirement - ou de façon plus organisée - les instants fragmentaires de clichés individuels pris successivement. Temps et espace se déconstruisent, se désordonnent, et se reconstruisent selon les agissements du spect'acteur. Chaque instant unique de prise de vue prend sa place à l'intérieur d'une recomposition galopante, sorte de "continuum de simultaniéité", où chaque instant unique est en collision avec ses pairs.

Le sens du tableau est transformé par des juxtapositions et permutations qui déstabilisent la reproduction photographique de la réalité. l'"Absolu" de l'enregistrement "objectif" initial fraternise avec l'"Arbitraire" des artifices irrationnels construits par interaction entre programme informatique et spectateur à l'intérieur du tableau, lieu d'épanouissement de l'esprit humain.

La photographie a toujours constituée un "cas limite". Frontière entre le réel et l'enregistré, via le lien optique s'opérant entre le sujet pris en vue et l'émulsion (éventuellement numérique). Frontière entre objectif et subjectif, où la caméra obscura absorbe de façon impartiale les choses que la main et le mental du peintre va s'approprier au sein de sa propre psychologie et capacité technique. Enfin entre le désir de créer une copie conforme, et mettre l'imaginaire en forme.

La frontière la plus passionnante est la plus fuyante face à la perception humaine : geler le "maintenant", cette présence si fine, en état de désintégration perpétuelle entre expectation du futur et mémoire du passé. La photographie tranche avec d'autres moyens d'expression, étant une sorte de scalpel qui peut "exciser" le "maintenant" hors du passage du temps afin de le figer pour toujours.

Mais on peut également voir dans cette quête pour le "maintenant" des relents tyraniques. Pourquoi ce moment là, et non pas un autre ? La même chose s'applique à l'espace, tout en contenant des possibilités infinies, il ne peut à tout instant être occupé physiquement que par un seul et unique être ou artefact. Ou illuminé d'une seule manière.

Dans la photographie interactive, les occupations multiples de l'espace et du temps peuvent être mises en œuvre dans une étreinte de simultanéité. L'algorythmique qui confronte ensemble, et en désordre, une multiplicité d'instances de "maintenant" au sein d'un seul tableau, permet de développer une compréhension du génie du lieu, et notre relation avec ce dernier.

Landscopes est constitué d'une série de onze tableaux : une description de chacun est accessible via les vignettes à gauche. Les photographies interactives elles-mêmes ne sont pas disponibles sur le réseau. Nonobstant, des versions en basse définition de deux tableaux - Ayguesvives et Jérusalem, Vieille Ville - peuvent être téléchargées.

Si cette œuvre vous intéresse, si vous souhaitez visionner un CD-ROM contenant la série entière, veuillez contacter joetopia.

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