DES LEITMOTIV  |  PHOTOPIA
Jérusalem, ligne de bus Egged 4
21 janvier 2001

Des Leitmotiv

"Genus Loci"

Le lieu est une préoccupation primordiale et permanente de ce travail, il s'agit du théâtre qui conditionne l'essence et le déroulement des événements qui s'y produisent. Ainsi, le point de départ de l'acte photographique est de cerner son genus loci - "esprit du lieu" - afin d'y situer le sens porté par le sujet. Ce mystère qui est lieu, chose externe à nous-même mais si profondément logé dans notre for intérieur, où il s'entremêle avec notre bien-être ou notre mal-être, est central pour percer la compréhension instinctive de nous-même recherchée à travers l'investigation artistique.

"Etats d'Urgences"

Il s'agit de photographies prises lors de différentes manifestations politiques, quand l'espace public, normalement stratifié dans son utilisation et son organisation, s'abandonne à la marée humaine, accaparée par l 'expression d'exigences communes. Ainsi, trottoirs débordent sur chaussées. De telles manifestations peuvent se constituer spontanément, suite à un événement précis, tel un traumatisme collectif, un exemple étant les manifestations contre Le Pen, la nuit du 21 avril 2002. Ailleurs, il peut s'agir de manifestations planifiées et préparées, par exemple celles qui se déplacent autour du monde en suivant les rencontres annuelles du G8.

"Melancoliques Anonymes"

Le tourisme, activité économique des temps modernes, a entraîné une marchandisation extrême du lieu, en tant que source de valeur indexée sur sa capacité d'attirance. On s'y attroupe, car "ça vaut le détour", "ça vaut la visite". Ainsi, le repos, les vacances, gagnés autrefois de haute lutte par les travailleurs, sont devenus un filon industriel à exploiter, représentant une partie non-négligable du PIB d'un grand nombre de pays. Il y a une mélancolie inhérente à l'investissement d'un lieu par des vacanciers se dépêchant de profiter au maximum de leur bon temps avant l'épuisement des congés. Cette même mélancolie accompagne le formatage des sites touristiques par ses aménageurs, avec leurs infrastructures d'accueil et leurs centres de profit.

"Prises aux Tripes"

C'est une manière de photographier, l'appareil équipé en grand angle étant placé au niveau de la taille, engendrant un dialogue à hauteur de ventre avec autrui. Nos ventres constituent la brèche de nos carapaces, l'épicentre de nos incertitudes personnelles, le foyer où cohabitent dignité et ridicule. Ce genre de photographie brusque son sujet, c'est un angle de vue où l'anatomie est mise à cru. Mais il permet de mieux cerner comment on occupe la place publique, comment on y vit, comment on y fait ses affaires. Il permet enfin d'exposer de façon consciente le geste d'agression qui est tapi au fond de l'acte photographique lui-même, d'autant plus au sein d'une société où le droit sur la propriété met en exergue la valeur monnayable attachée à son image.

"Fugacité"

Ici on interroge le rôle de la composition au sein de la technique "prises aux tripes", où on ne cadre pas l'image à travers le viseur : au lieu de cela, on regarde le sujet directement, et on essaye d'englober l'instant fugace en pointant l'appareil, placé devant son ventre, dans la direction générale. La composition qui en résulte est imparfaite, l'équilibre esthétique est approximatif. En contredisant le désir de contrôle, qui s'exprime à travers un travail de composition minutieux, on désamorce le caractère statique et parfois stérile d'une mise en géométrie trop parfaite. Photographier ainsi rend compte de l'harmonie naturelle qui imprègne le désordre du réel... Après tout, la composition est une construction cérébrale basée sur des règles perceptuelles mentales, qui n'ont aucune existence en dehors de l'œil qui observe.

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